samedi 23 septembre 2006

Le Che à toutes les sauces










Le Che "Diego Métrosexuel" de San Telmo, Arg. (notez le tatouage du Pibe de Oro Maradona+ le petit haut JP Gautier moulant + l'exclamation en rose + le lance-pierres en caoutchouc: violent, mais pas trop)



Le Che Banderole, plus conventionnel, icone de "revendication syndicale", devant le Palais Présidentiel Argentin





Le Coca Che, dans les Andes


(très souvent peint près des gros panneaux de pub agressive - au passage, COCA et PEPSI utilisent massivement des feuilles de coca des pays andins)





Le Che Calendrier, un classique







Le Che, Icone universitaire

ici récupéré dans une improbable filiation historique avec Bolivar, à l'UCV (Université centrale du Vénézuela) de Caracas






QUESTION: Le Che, donc. Vous y croyez encore, vous, comme lui l'a cru de toutes ses forces, de toute sa sincérité et de tout son dogmatisme forcené, à la refondation morale et intégrale de l'individu, à la création de l'homme nouveau?

Vous êtes vraiment allés à Cuba, sans déconner?
Vous connaissez les décrets de 1962 interdisant tout syndicat, toute critique de la Barbudo vibe? Les exécutions des "lights" ou des "déviants"?
Vous avez lu le "Journal du Che en Bolivie"...? Son pathétique "Toujours pas de contact" avec la population locale, sublime aveu d'impuissance et constat d'échec, sans jamais aucune remise en cause de La Ligne (aveuglé par sa théorie du"foyer révolutionnaire andin"..sans rien connaitre des dynamiques paysannes réelles de la région, tentant de plaquer ses certitudes à des réalités qui lui glissaient complètement, irrémédialement des mains... etc...).
Un courageux idéaliste. Un combattant flamboyant. Un sincère. Mais si son portrait (logo davantage reproduit de par le monde que le SWOOSH de Nike), trône toujours dans les chambres estudiantines et les coeurs de gauche, putain Che, qu'est-ce qu'il a mal vieilli, pourtant...

D'ailleurs, il n'y a pas que Cuba pour reprendre ce bon vieux mythe de l'homme nouveau. Si vous avez aimé les théories du Nouvel Etre Suprême de Robespierre, vous adorerez les injonctions à créer l' homme nouveau "révolutionnaire", dans le Venezuela bolivarien...
Au pays du pétrole abondant qui sème la torpeur, des lumpen pétasses criollas qui passent menseullement sous les coups vigoureux du bistouri, et du reggaeton porto-Ricain nonchalant, bah, c'est pas gagné de toute façon...
Comme le disait le grand Niestzchéen Axel Rose (des GNR, cui là même), KILL YOUR IDOL...


dimanche 17 septembre 2006

La rue est à eux:
San Telmo, Buenos Aires





Les ramblas de Barcelone, en comparaison, c'est morne plaine...

San Telmo reste pour moi le quartier des antiquaires, des loulous, des bigots, des artistes de rue (mimes, musiciens, danseurs de tango, jongleurs plus ou moins talentueux), des charlatans, des djeunss skaters, des keupons, des bobos du crû, des fouineurs et chineurs de province ou d'ailleurs, des bohèmes, des cultureux, des bohèmiens sur le perron des boutiques d'antiquaires les plus courrues, des étudiants branchés, des auto-proclamés alternatifs, des no-logos, des pavés, des dimanches de flemme, des promenades mains dans la main, avec la gueule de bois de la veille (enfin de chaqui (andes)/ de cruda (Am centrale et Mexico)/ de resaca (espagne et Cono Sur), des odeurs d'encens, du tango cheap, du tango de calidad. Et des pizzas pour touriste, dont je suis, preque aussi bonnes que chez l'ancêtre napolitain.

QUESTION: est-il possible, pour des quartiers comme San Telmo, de ne ne pas se laisser complètement récupérer et engloutir par les vagues impitoyables de la spéculation immobilière, des investissements massifs dans le "tertiaire-services de la nuit" aseptisée (boites hype, bars de luxe, sex-shop soignés, médiathèques culturelles avec tourniquets et badges à l'entrée), des projets de "réaménagement du territoire urbain", qui rabotent tout sur leur passage, expulsent de facto tout ce qui est marginal ? On l'a vu à Barcelone, barrio chino, on l'a vu à Montmartre, on l'a vu à Rome...le verra-t-on à San Telmo?

vendredi 15 septembre 2006

Pérou-Bolivie, via Titicaca: l'autre Love Boat






Perou-Bolivie, via Titicaca: l'autre Love Boat

Les bus. Evidemment.

Celui-ci a certes tous les attributs classiques du transport folklo-déjanto-rock n' roll que l'on est en droit d'attendre sur un trajet aussi prestigieux...Mais vous conviendrez qu'il a ce petit truc en plus. Un supplément d'âme, allez, n'ayons pas peur des mots.

D'un côté, les standards syndicaux minimaux sont également et prestement respectés: dévalement des pentes sinueuses sans se servir des freins, se servir des "freins" sans se servir des pédales de freins, musique à fond les ballons-cumbia, reggaeton ou flutes de paon, parfois en même temps, corne de brume surpuissante en guise de klaxon, tableau de bord psychédélique, halluciné, ou le regard se perd entre les injonctions braillardes à ne pas molarder, à ne pas hurler, à ne pas causer au chauffeur merci, les textes en relief boisé des prières à Saint Christophe et des nichons qui s'étalent, placardés les uns sur les autres (miracle d'un collage bien évidemment très réussi), des crucifix électriques et flashys qui vous font reconsidérer votre athésisme ou votre baptême, c'est selon, des autocollants tout aussi criards de Titi et gros minet, du lapin playboy, des guirlandes de Noêl qui chaloupent au gré des virages... Bon, tout y est, on est dans le classique.

Mais là, on a tout de même affaire à mon poulain favori: THE cruise of THE love...que de promesses de petits matins alanguis, tous ensemble...que d'espoirs de rencontres romantiques sur cette croisière internationale...mmh, Juliaca, Tiquina, ô, sympathiques escales...Et puis (dernière photo), même au milieu des bloqueos/barrages routiers de protestataires, extrêmement réguliers des deux côtés de la frontière, il passe en force. No soucy. A traves les champs de chunos (patates de l'altiplano), rien à foutre. Je fonce. Attitude du chauffeur, "kappuie sur l'champignon", tout à fait acclamée par la foule en délire.

QUESTION: est-ce qu'un jour The cruise of the love osera enfin recruter un barman afro-bolivien (il y en a 4000, surtout dans la région des Yungas, derrière la Cordillère- nous y reviendrons), un Capitaine bien "k'ara" aux dents élimés ainsi qu'un croupier blond délavé? Histoire que le touriste gringo s'y retrouve un peu...Love boat, is expecting you...

Bref, The cruise of the boat of the love, j'ai adoré. Ma copine aussi d'ailleurs...

mercredi 13 septembre 2006

Paco, de viaje


http://www.radioblogclub.com/open/106750/paco_ibanez/Paco%20Ibañez%20-%20Como%20tu


http://www.radioblogclub.com/open/106750/paco_ibanez/Paco%20Ibanez%20-%20Volveran%20las%

Paco Ibañez, comment vous dire...
C'est comme un bon bouquin, jauni dans les coins, un peu écorné qui rentre plus dans le sac à dos; dans la précipitation d'un énième départ à l'arrache, on se sent "chargé", presque investi de cette mission de le prendre avec soi, malgré tout. D'une façon ou d'une autre, sa présence se fera nécessaire un moment donné. Et, alors, on le prend.
On le fait surtout vis à vis de soi. Voila, Paco, c'est pareil. Ce sont des vielles cassettes qui trainent, dans un vieux walkman: ca fait partie intégrante du voyage.

Kassdédi à Paco.

"Como tu".

Et "volveran las oscuras golondrinas".

Patxi

lundi 11 septembre 2006


Graffitis, collection n° 1

"Hormando, ni cagando": Hormando (possible successeur présidentiel de Carlos Mesa par le truchement de la Constitution, le pays étant en proie à un grave conflit- mafieux notoire), ni même en chiant (littéralement- l'idée étant : même pas la peine d'y penser...)

"Si JC avait été une femme, elle n'aurait pas réussi à trouver un seul disciple à ses côtés" (mujeres creando, groupe d'activistes féministes et d'agit-prop urbaine assez délurées)

La Paz, Bolivia


Bs As, Argentina- mur d'une banque- sin comentario


Puno, Pérou - "Non au bloqueo, oui à la réconciliation"- 3 semaines de bloqueo/barrages de routes dans le Sud du Pérou ont divisé le pays


San Telmo, Bs As, Argentina - "Par amour, utilise un préservatif" - l'image du Che, utilisée depuis 40 ans jusqu'à la corde, ici au service de la prévention des comportements sexuels à risque dans le quartier bohème de Bs As...

Les graffitis, en Amérique latine comme ailleurs, sont toujours un très bon indicateur de l'humeur politique, sociale ou culturelle du moment. Les villes du continent comptent ainsi d'excellents "éditorialistes de rue" qui, sincèrement et sans démagogie aucune de ma part, valent bien les "spécialistes/experts/analystes" attitrés du Miami Herald ou de CNN en espanol.

Patxi

samedi 9 septembre 2006

Guerre de Genre

Restaurant-comedor familiar de Don José. Petite communauté rurale du Nord de Potosi, un des Départamentos (Régions) les plus pauvres, les plus indiens et les plus isolés de Bolivie

Traduction: poster de gauche, promotion d'une association locale de santé communautaire: "Pour que les femmes puissent s'organiser" - poster de droite: "Surena-celle du Sud: la bonne bière!!"

La fracture entre le pays réel, composé à 72% de population indigena, qu'elle soit aymara, quechua, guarani, moseten etc, et le pays imaginaire, blanc, véhiculé par les médias (la grande plante réifiée, superbe, blonde et dénudée, ici qui s'accroche à une bouteille ma foi toute phallique), est un trait saillant immédiat pour le visiteur européen qui débarque en Bolivie. Les décalages permanents sautent aux yeux du visiteur, même pour le plus distrait, même pour le moins attentif d'entre eux. Leur analyse contribue à comprendre le contexte de l'arrivée au pouvoir d'Evo Morales.

En décembre 2005, le pays réel a fini par surgir et s'installer irrémédiablement dans les urnes. Depuis 2000, les communautés de base, au niveau local et régional, se sont fédérées, organisées, préparées, notamment grâce à de nombreuses structures locales telle que cette association communautaire. Pendant que Miss Bolivia (en compagnie de ses frivoles de copines-supermodelos, elles aussi originaires de Santa Cruz- basses terres du Sud-Est), qui exhibe allégrement ses belles fesses sur ce type de poster au gré des saisons, déversait sa bile raciste sur les habitants de l'Altiplano (hautes-terres).

Guerre de genres. Les femmes jouent un rôle cardinal dans les communautés rurales indiennes de Bolivie, dans la sphère privée comme dans la gestion des affaires publiques. D'ailleurs, anecdotique mais authentique, le premier club d'hommes battus d'Amérique latine s'est ouvert en 1976, à La Paz...

Certes, la femme-objet et sa représentation soft-core ont encore de beaux jours devant elles. Mais désormais, d'autres visages féminins occupent et continueront d'occuper, de façon irréversible, l'espace public, le haut de l'affiche, les posters des comedores populares. Ces femmes ont des tresses jusqu'au bas des reins, cinq à six épaisseurs de jupons, des gamins dans le dos. Le poing tendu, elles revendiquent désormais un futur, celui-là même qui leur fut sans cesse dénié ou repoussé aux calendes greques.

Leur visage a le couleur de la terre. C'est l'autre genre. La région devra s'y habituer.

vendredi 8 septembre 2006

BRASIL:
les gamins de salvador de Bahia, les autres saoûlés du Carnaval...


Il fait près de 45 degrés à S. de Bahia. Les adultes sont happés depuis 3 jours par la démence dyonisiaque et contagieuse du Carnaval. Ils se dandinent avec une euphorie non dissimulée, pendant des kilomètres et sous le cagnard, en suivant les énormes chars tractés sursaturés de bons gros sons qui tabassent (les fameux AXE'), ou de plus modestes Musik Mobiles improvisés. Les gamins, eux, trainés sur des kilomètres interminables de danse hystérique par Papa-bourré et Maman-pas mieux, se lassent vite de tout ce bordel conçu par et pour les grands. C'est ainsi, jamais à cours de conneries, qu'ils s'occupent, en dépeçant la borne à eau des pompiers...

QUESTION: pourquoi le Brésil?

Au royaume de l'arnaque,
les filous, les marlus et les charlatans sont rois
Mendoza, Argentine- foire-exposition commerciale

J'adore ce stand. Déserté par le batteleur/tchatcheur/démonstrateur habituel (sans doute partir vider quelques godets ou se trouver un séant plus confortable), il s'inscrit dans la grande tradition latino-américaine de la vente de rue du Produit Miracle. Mine de rien, le type là, en photo, avec sa coupe de crooner satisfait (et pas seulement de la bonne tenue de route de ces implants, pero de calidad), nous interpelle, avec son poignet magique, son doigt tendu et son air avenant: son bracelet magnétique, nous dit-il, et comme nous l'indique l'affiche, est composé des cinq métaux curatifs principaux: fer, zinc, étain, argent, cuivre.

Au milieu du bracelet, surgissent les mots EQUILIBRE, HARMONIE et TRANQUILITE, ce qui, ma foi, est un programme bienvenu en ces temps de crise argentine. Mis sur le poignet gauche, il soigne les rhumatismes, les douleurs musculaires, l'arthrite, mais il élimine aussi les maladies psychosomatiques (sans déconner!). Il nous est enfin rappelé (en bas à droite) que la magnothérapie et l'acupuncture chinoise, c'est cool.

Nos grands-mères nous ont beaucoup parlé des profiteurs de guerre, sous l'occupation. Pour ma part, tel Tatie Danielle ou un improbable Tonton d'Amérique tombé dans les oubliettes de la mémoire familiale, j'aimerais vous causer des profiteurs de crise.

Je les aime tellement que je vous en remets une petite, d'arnaque à la latinoamericana, pour la route:

Banque VIDE - Buenos Aires, Argentine, durant la crise de 2001 - Fuite des capitaux, chaos bancaire et dévaluation (novembre 2001 - avril 2002)

QUESTION: qui n'a pas acheté au moins une fois dans sa vie un truc complètement bidon suite à une session impromptue d'envoutement de rue, ou une télé-achat lamentable, ou via une "recommandation personnelle"? Parfois, on a tous envie d'essayer, au cas ou, d'acheter ce genre de trucs-miracle. Ca remonte au trauma refoulé du pendentif magique de Danielle Gilbert peut-être...Les vendeurs d'Amérique latine sont particulièrement doués pour tout ce qui est poudre de perlinpinpin. Il faut dire qu'ils profitent d'une propension généralisée et assumée à se laisser aller au mysticisme et à l'ésotérisme plus ou moins cheap, qui n'est plus de rigueur dans notre territoire sécularisé...Mais il y a tout autant de shamanes que d'escrocs, en ces contrées.

Quant aux petits épargnants qui se sont faits vertement enfilés, ils feront l'objet d'un prochain post, un de ces quatre matins.

Patxi

jeudi 7 septembre 2006


CONTRASTES
Chapitre I
Elle s'appelle Juana, elle a 13 ans.
Elle ne parle pas complètement l'espagnol, mais le comprend bien.
Elle vit dans une communauté Quechua particulièrement isolée de Bolivie, accessible par 4x4 en 11 heures de piste chaotique depuis la principale ville de la région, Cochabamba. 11 heures, 4 étages écologiques distincts, des précipices infinis, des anciennes haciendas dont les parcelles récupérées au long de l'histoire (surtout depuis la réforme agraire de 1952) révèlent une rude économie de subsistance...
Cette communauté, pour aussi isolée et inaccessible qu'elle soit, est pourtant un espace à la fois clôt (rites d'introduction, rites internes de passage-d'un âge à l'autre, d'un statut à l'autre, méfiance inititiale envers l'intrus, pratiques traditionnelles -justice, culture- séparées de la vie "républicaine") et ouvert (multi-ethnicité pacifique entre métis, quechuas majoritaires et aymaras, sens indescriptible de l'hopitalité, adaptation pragmatique à la réalité "moderne-urbaine" lors des migrations temporaires, curiosité envers l'autre, une fois la confiance installée-même fragile).
Ce jour était un jour de fête et de célébration. J'y fus invité, en compagnie des 2 sympathiques barbus franchutes, compagnons de route de ces jours-ci. Nous avons pu apprécier les chorégraphies des mamans de la communauté, que l'on voit s'affairer derrière Juana. Les danses, les chants, les discours à la Patria grande et les hommages à la Pachamama. Les rituels catholiques et les quechuas.
Soit le synchrétisme, brut, dans ta face.
Son lama-llamita, à Juana, né récemment, elle en prend bien ,soin car la portée antérieure n'a pas survécu au-dela de quelques jours.
regardez-le. Il est terrorisé par ce stupide white man qui le fixe de son oeil digitalisé.
Elle rit aux éclats.
La communauté a fini la soirée bien bourrée. Bien soudée, aussi.
Chapitre II.

Vous n'êtes pas obligés de me croire. Mais en bleu, "brassard blanc", là (et avec son aimable autorisation), c'est Juana, qui nous vient de la région métropolitaine de Caracas, Venezuela.

Cette plage était autrefois réservée aux seuls membres de l'entreprise du pétrole PDVSA. Elle est aujourd'hui ouverte à tous. Un vrai cliché qui reprend le slogan gouvernemental, "Venezuela, ahora es de todos" ("désormais elle est à tout le monde"). Derrière le conte bonito, il y a aussi la verticalité et les pressions.

Juana et sa soeur sont venus en bus, mis à la disposition du Gouvernement Régional de Miranda. En contrepartie, m'expliqua ce jour Juana, 32 ans, elles doivent assurer toute une série de tâches pour les organisations officielles du pouvoir chaviste local, et pour certains bras civil des cercles bolivariens et du front Francisco de Miranda. Appliquer les consignes. Et suivre La Ligne.Elle avoue, entre deux verres de Cuba libre, que parfois, elle aimerait être libre, justement, de ne pas assister à certains ateliers sur l'histoire de la révolution cubaine ou sur Bolivar qui sont longs et rébarbatifs.

Juana a trois enfants et n'a pas de mari. Il a foutu le camp, mais elle ne semble pas le regretter.Elle a sa soeur, ses enfants et deux amies.

COMMENTAIRE: deux réalités incomparables. Mais... Juana la venezuelienne n'est pas isolée par une géographie complexe, elle est libre de ces mouvements, mais elle subit des contraintes politiques "monnayées" par des avantages sociaux (nourriture, inscription prioritaire sur les listes des Missions). Juana, de Miranda, parle des leaders bolivariens de son quartier comme des opportunistes qui font tout pour éviter les débats. Imposer une ligne leur permet de garder leur espace de pouvoir, me dit-elle. Sa vie n'est pas facile, son rire est profond. Juana la quechua est isolée, mais peut compter sur sa communauté, maintenant et à l'âge adulte. Le pouvoir là haut est en rotation: chaque année, les dirigeants principaux de la communauté sont changés, par vote collectif, après présentations des bilans, débats et délibérations. Elle aura bientôt 14 ans. Sa vie est rude, son rire est profond.

CONTRASTES

Patxi

lundi 4 septembre 2006




MESSAGE INAUGURAL
Amérique latine, je me souviens.
1- Ce blogue n’a pas vocation à être un journal de bord.

2- Ce blogue ne vivra pas sa dynamique au jour le jour.

3- Si un lecteur vient s’égarer par hasard sur cet espace, il y trouvera surtout des fragments, épars, des souvenirs plus ou moins limpides de 5 années de vie en Amérique latine
.

4- Au gré de ces photos partagées (instantanés personnels, pas intimistes), quelques légendes viendront causer de ce qui se passe, de ce qui ne se passe pas, du scénario en train de se dérouler sous mes yeux.
De ces commentaires, de qualité bien évidemment inégale, de ces analyses ou simples instantanés de témoignages, surgira , en coin, une question.
Et, à partir de cette glaise là, idéalement, un semblant de débat, sur la vie politique et sociale de cet espace des possibles si méconnu en France.

Ce que l’Amérique latine a à nous dire, ce qu’elle dit et dira de nous-mêmes, d’elle même.
Tout ça. Pêle-mêle.



5- Pêle-mêle, nous irons au Mexique, depuis les odeurs du quartier populaire de Tacuba, DF jusqu’à Los Pinos, du siège du PRI en passant par la Sierra des Tarahumaras, chère à Antonin Artaud. Au Guatémala, on bougera sans doute de San Pedro à Chichi, du parcours de la symbolique de Rigoberta jusqu’aux effluves de Livingstone, jusqu’au Guaté bas-fond de Ciudad de Guatémala. Halte au Honduras pré-colombien. Nous irons en Colombie, de Cucuta jusquà Bogota, et nous écouterons avec effroi des histoires de narco-paramilitaires et de narco-guérilleros, nous écouterons, aussi, l’incommensurable poésie de ce pays qui ne pouvait qu’accoucher, un jour ou l’autre, d’un Garcia Marquez. Nous serons au Venezuela, de Mérida à Caracas, à tâcher de voir ce qu’il en est de ce qui nous est vendu comme la « révolucion bonita », ce qu’il en est de ladite « dérive autoritaire », de ce qui en est du culte du Beau collagêné. En Equateur, de Quito a Cuenca, grandeurs, splendeurs, misères du pays qui veut exister (E.Galeano). Au Pérou, de Lima jusqu’à la Valle sagrada de Cuzco, de Alan Garcia aux syndicats aymaras de Puno, de Pisac jusqu’aux orgueils telluriques d’Arequipa. Nous vibrerons en Bolivie, como la quiero yo, de haut en bas, de gauche a droite. Les dessous d’Evo, les chunos, le Salar, les projets de développement qui marchent et ceux qui foirent, le commerce équitable, la nacion camba, les mouvements sociaux, la terre, la terre. Les espaces infinis. L’imaginaire ségrégationniste. Bolivia pues.
Nous irons en Argentine, de San Telmo au Calafate, des péronistes aux péronistes. Des antiquaires de Mendoza jusqu’aux rigueurs patagones.
Nous irons au Chili, celui de ma chère grand mère à moi, abuela, que descanses, le Chili de l’amnésie et le Chili apaisé, celui qui fonctionne, celui qui souffre, celui du magique Torres del Paine jusqu’aux vigognes de l’extrême nord.
Aussi, nous irons au Brésil (pourquoi le Brésil ?), depuis la speedée Sao Paolo jusqu’aux déhanchements des grands-mères de Salvador de Bahia. Ah, le Brésil…

6- Qu’il en soit ainsi. Ce blogue sera décousu et rétrospectif, mais tâchera de ne pas être trop nonchalant ou trop facile. Vous l’aurez constaté, il est déjà prétentieux le bougre : il veut être excitant et funky, mais recherchera surtout le temps long, et la respiration si particulière des anciens. Il se voudra bandant, mais sans épouser systématiquement les soubresauts de l’actualité sur le Continente latino-américain, « reflet inversé » de notre Occident européen, et bien plus que cela, tel que l’a si bien décrit Carlos Fuentes.

Je ne suis pas foncièrement doué pour écrire, et peu familiarisé avec ce type de support. Mais je découvre et apprécie depuis peu, en ringard invétéré, la créativité de certains blogues.
Et je constate que l’Amérique latine reste très périphérique dans l’actualité, les cœurs et les imaginaires européens. Et cela est bien dommage.
Ce blogue naît donc aujourd’hui, dimanche 3 septembre 2006, jour du départ d’un ami chilango de corrazon qui m’est cher.

7-
Les voyages initiatiques, la vie même, commencent souvent au moment du retour.
Amérique latine, je me souviens, naît de cette envie de partager des bribes de réflexion sur cet autre occident compliqué, de l’envie de faire mon miel de certaines de ces expériences, d’en partager certains petits bouts. Pas les plus intimes (surtout pas), mais ceux qui me semblent contenir une part de nous tous, une part d’universel (certes un bien grand, voire gros mot...).

Rencontres avec soi même. En Amérique latine.


Patxi