dimanche 26 août 2007

Les enfants de Hollywood (Colombie)

Les grandes plumes de la presse internationale se moquent (allègrement) et traquent (sans relâche) le moindre faux pas du populiste issu des llanos ruraux de Barinas, Venezuela, Hugo Chavez.
La presse mondiale et régionale est là, aux aguets, toujours prompte à discréditer d'emblée les positions et politiques parfois fantasques de l'incontrôlable bolivarien. Corruption, insécurité, violations de droits de l'homme. Pas une semaine sans lire les pires horreurs sur le Venezuela de Chavez.

En creux, et dans un parallèle parfaitement symétrique, on peut aisément constater la mansuétude, le silence et la tolérance complice de ces mêmes producteurs de communication et d'opinion globalisée, envers l'autre grand populiste de la région, l'oligarque Alvaro Uribe (ce mot a un sens très précis à Antioquia, sa région d'origine: d'ou son utilisation ici même).
La Colombie atteint sa troisème génération en guerre. Le conflit armé interne colombien génère chaque jour des violations massives aux droits humains fondamentaux autrement plus généralisées et systématiques, et un impact humanitaire autrement plus intense, que partout ailleurs en Amérique. Un président qui nie tout simplement qu'il y ait un conflit armé (prblème de "terrorisme", dit-il), l'existence de 3 millons de déplacés internes, de 11 à 13 000 enfants soldats au sein de groupes irréguliers, plus de 826 victimes de mines anti personnel l'an dernier dans son pays etc, une solide extrême pauvreté et d'énormes niveaux de corruption liées au narco, au plus haut niveau, mériterait un traitement médiatique tout aussi sévère.

Deux poids deux mesures, qui n'étonnera que modérément le lecteur un tant soit peu alerte et, j'ose le gros mot, conscient.

Aujourd'hui, deux shots de Chicha sur la Colombie osscura, histoire de rappeler deux trois évidences:

- cette très belle vidéo sur un quartier afro parmi tant d'autres en Colombie, les enfants d'Hollywood, Buenaventura (ville ou par ailleurs explosent des bombes artisanales qui tuent des civils, régulièrement, depuis 2004)




- cette analyse sur RISAL

La Colombie est le plus grand cultivateur de coca illégale et le plus grand producteur de cocaïne au monde. Elle est aussi l‘un des principaux fournisseurs d’héroïne du marché des Etats-Unis. C’est le premier ou le deuxième producteur de faux dollars états-uniens ; elle a le nombre le plus élevé d’enlèvements et d’assassinats commandités ; elle occupe la deuxième place pour le nombre d’enfants liés à la guerre et d’habitants touchés par les déplacements internes ; elle est le premier ou le deuxième pays latino-américain exportateur de prostituées, et elle a la plus grande ou deuxième plus grande guérilla marxiste du monde [les Forces Armées Révolutionnaires de Colombie - FARC, ndlr]. La Colombie est le plus grand producteur de passeports de la Communauté européenne et d’euros de grande qualité. Mi 2006, la police a démantelé une usine dans laquelle on falsifiait les difficiles dollars australiens. Inévitablement, dans de telles circonstances, la corruption est rampante.


Chavez a été mis en place par son peuple.
Uribe a été mis en place par les groupes paramilitaires.
J'y verrai, jusqu'au bout, une certaine différence.
Il n'empêche: les deux sont néanmoins de dangereux populistes qui perpétuent une impunité inégalée jusqu'alors. Leur traitement médiatique totalement différencié devrait, lui aussi, nous inviter à la réflexion.

6 commentaires:

Anonyme a dit…

C'est vrai on a tendance à oublier Uribe dans nos prières païennes. Pas un Saint, loin de là, un homme qui était proche du Cartel de Medellin. On a aussi tendance à oublier que le premier acte politique de Chavez fut une tentative de coup d'État pour laquelle la condamnation fut d'une grande mansuétude, tentative qui aujourd'hui ne serait certainement pas punie de la même manière.
Mais tu as raison, Uribe, quand même élu, même avec un fort pourcentage d'abstention, il ne faudrait tout de même pas l'oublier, fait aussi partie de la collection de zouaves qui gouvernent ce continent.
Le populisme est toujours de droite, même s'il se présente comme étant de gauche. C'est une négation très forte de la démocratie et un attrait auquel même nos nations plus averties sont malheureusement de temps en temps réduites.
Je fais donc une croix dans mon pense-bête, il y a des noms bien choisis de temps en temps, afin de ne pas l'oublier.

jpeg a dit…

c'est vrai comment ne pas être étonné par ce silence radio sur la Colombie?
Une théorie peut-être: il y a ce qui est simplifiable, transformable en matière journalistique digeste.. et ce qui ne l'est pas.
Article sur Chavez, sur la modif de la constitution, on compare point par point les nouvelles orientations avec les régimes de Castro, de Staline, Pinochet, de Mussolini, etc... tout ce qu'on apprend en Histoire Géo quand on n'est pas occupé à draguer Sandrine Dumont qui a malgré tout l'adolescence ingrate...
Comment décomposer le sujet Colombie en plein de petits morceaux d'histoires simples et qu'on a déja appr!ses ("on" est ici la masse immonde de la répugnante populace qui n'a jamais pu se faire expliquer la Colombie par un Patxi ou un autre animal de son espèce)?
Si, en fait, on en a une d'histoire: Ingrid. Quand elle sera libérée, tout sera réglé non?

Anonyme a dit…

Merci Patxi... surtout après le massacre d'hier (dimanche 27 aout) dans le putumayo...
Le cas colombien est compliqué, un peu je suis d'accord mais pas tant non plus. Le problème est qu'on voudrait que son histoire soit figée ... et naturellement c'est pas le cas. Les autodéfense n'étaient pas les même en 1960 quand 1995, de même pour les FARC.
Et Uribe... quand je pense qu'en Colombie on parle de plus en plus d'un 3e mandat... ça fait rire, jaune bien sûr! Très jaune.

Anonyme a dit…

Tsss.
Ce réquisitoire sonne un peu faux. La profession de foi renouvelée de quelqu'un qu'on aurait pu, qu'on pourrait, dans son milieu, qualifier de réactionnaire déviant...

Va en Colombie, où tu veux, prends le temps de parler avec les gens, les vrais, pas les professionnels de la commisération, et tu découvriras une réalité plus nuancée. En gros, fais la même démarche que celle que tu as engagée, avec profit, sur le Venezuela...

Tu vaux mieux que cette caricature du bobo vigilant...

Patxi a dit…

Personne ne parle de cette mignonne vidéo..dommage.

Phiconvers, et ton voeu de silence?

J'ai probablement plus visité la Colombie profonde, rurale, celle ou se joue le conflit (t'as jamais foutu les pieds dans le Choco,le Putumayo, l'atlantico ni l'Arauca, à l'évidence) et parlé à plus de colombiens victimes du conflit que de "non affetés", probablement, oui, Phiconvers.
les grandeurs de l autre Colombie, pays le plus fascinant et merveilleux qui soit, je laisse le soin à d'autres de les décrire.
Ici je fais ce qu'il me plait, mais je ne dis jamais n'importe quoi me semble t il.
Je sais que tu es chatouilleux dès qu'on touche à ton Président Uribe.
les faits sont têtus. les historiens un jour pourront établir les faits. L'Etat reconnait pour l'instant 11 000 cadavres dans des charniers, la CCJ près de 32 000.
C'est donc être bobo que d'évoquer ces raalités invisibles là.

Bobo ne veut strictement plus rien dire.

Mais que Patxi soit une caricature de beaucoup de choses, volontiers.

Un abrazo bolivarien, donc

Anonyme a dit…

Mais voyons, Patxi, très bien l'abrazo bolivarien. Uribe, par rapport à lui, c'et un tendre dangereusement faible. Et Chavez gâche le repos auquel pourrait justement prétendre le libertador, père du conservatisme andin et singulièrement colombien. Passons.

J'ai déjà eu l'occasion de dire que le fait de fermer mon blog ne signifiait en aucun cas que je me privais de la possibilité d'intervenir ici et là, cuando me da la gana.

Tu te trompes sur ma connaissance de la Colombie et de ses zones rouges. Mais, tu fais bien de le rappeler, la Colombie, ce n'est pas que les victimes du conflit au fin fond du Putumayo. C'est aussi les familles urbaines estrato 3 o 4, qui luttent pour vivre normalement et, comme toutes les familles du monde, pour basculer du "bon côté". C'est aussi une élite, souvent irresponsable et égoïste mais parfois remarquable, etc.

Attribuer à Uribe les fosses communes, les massacres, les abominations de ce conflit, c'est malhonnête et je te le dis depuis un certain temps. les responsables directs de ce conflit sont les guérillas, les paramilitaires, nés de la faiblesse de l'Etat justement, et non de son excessive militarisation, les mafieux, si tant est qu'il soit aujourd'hui possible de séparer tous ces salopards mûs par l'avidité, la barbarie et par quelques scories d'idéologies dévastatrices pour les premières.

Ahora, qu'il y ait eu des collusions entre les uns et les autres, et notamment entre la puissance publique et les guérillas dans certains coins ou entre l'Etat et les paramilitaires ailleurs, c'est un fait. Ce n'est pas une politique d'Etat et Uribe a plus fait pour rétablir l'institutionnalité que tous ses prédécesseurs récents réunis.
Point Barre (paix à son âme)