samedi 3 mars 2007

Le Paraguay est pédé


Machistador de playa, premier degré. Compagne silliconnée de partout.

Machistador de playa, premier degré. Merde il a capté le zoom.


Quelque part dans une ville latino-américaine, en 2004. Il va de soit qu'il s'agit d'une fidèle reproduction d'une discussion véritable entre deux expatriés français. Mise en ambiance dance, obligatoire: Soft pink truth: homosexual.




Lui: - Tu comprends, là bas aussi, je roulais ma bosse dans ce milieu de la production culturelle, les "arts et pestacles", les visites d'artistes "internationaux" capricieux, tout ça.
De belles années. Le pays est vraiment fascinant...Il est assez méconnu, on en a souvent une fausse idée. Ou pas d'idée du tout d'ailleurs.
Elle: - Les hommes du Paraguay sont assez connus pour être des machos de première, homophobes et tout, non? On t'a pas trop emmerdé avec ça?
Lui: - Ecoutes, là, pour le coup, on est loin du compte. En fait, rien n'est moins vrai: figures-toi que je ne me suis jamais autant tapé de mecs straight que là bas.
Mais tu n'imagines pas. C'était incroyable. Je pouvais pas sortir sans me culbuter un papa. Et ça se passait surtout dans des endroits bien fréquentés, bien hétéros, bien comme y faut.
Elle: - ça veut dire quoi des mecs straight?
Lui: - des gens comme toi quoi, mais en mec, des hétéros.
Elle: - Je vois...Et tu les draguais comment les bons pères de famille?
Lui: - Ah mais je n'avais pas besoin de me fouler...Ils s'approchaient d'eux même, du genre "conversation bégnine d'hétéro", mine de rien, et de quel beau pays nous venez-vous, et je suis chef d'entreprise, et je suis banquier, et je fais de la muscu, et vous aimez la pêche sportive, et je suis marié à une superbe femme...et ces gentils glandus de s'empresser de me montrer la photo de l'épouse, au comptoir, comme ça. Déjà, c'est cramé.
Elle: - je vois...
Lui: - Je te le dis, jamais je ne me suis tapé autant d'hétéros non assumés, non sortis de leur placard qu'au Paraguay. C'est pas anecdotique ce que je te raconte là, c'est un réel phénomène, structurel je dirais même. Ca prend des proportions dingues. Je te parle de dizaines de type. En proportion, dans un pays considéré super macho, super pas gay du tout... Mais mort de rire. Le Paraguay, tout le Paraguay est pédé. Le mythe du bigoton (moustachu) d'Asuncion, coureur de jupons et sûr de sa virilité, excuses-moi, mais c'est une façade des plus évidentes. Le Paraguay est pédé!
Elle: - je vois! (Rires)
Lui: - Parfois ça me mettait en colère. Parfois j'étais plus clément. Certains sont violemment faux-culs, odieux. D'autres, tout simplement, ont peur, se cachent. Terrifiant. Il y en a un parmi tous ces braves papas qui est vraiment sorti du lot...Mais à la fois, c'est tellement symptomatique...si tu veux, ça résume parfaitement ce que je suis en train de te dire. Une précision s'impose, tout de même: on n'est pas dans la théorisation fumeuse là. On est dans l'épreuve de validation empirique, survérifiée, de l'hypothèse de départ. C'est vécu et expérimenté par bien d'autres homos, nationaux et expats. Tu vois?
Alors voilà le tableau. Je suis dans un bar, mais alors, super full hétéro.
Elle: - je t'interromps, mais comment tu distingues un bar gay d'un bar hétéro toi ?
Lui: - Je distingue. T'inquiètes donc pas, on est équipés pour ça.
Le gars s'approche, mine de rien, genre revenu de tout. On est là pour parler sport et politique, quoi, tu vois. Même topo, tout en esquive. Je sens déja poindre un truc louche, du genre "je veux mais je veux pas Monsieur". Mon dieu. Pauvre enfant...Vu la situation, sa maladresse éhontée, je l'aide un peu.
Bon, clic clac, ça finit ou ça doit finir. Je dis clic clac, mais en fait il a fallu en surmonter des roueries de sa part, de son moi, de son sur moi, de son éducation homophobe, du regard de la société, "que je veux", mais "que je sais pas", mais "que je veux pas en fait", mais que "sale pédé" qu'il me dit à un moment le type, feignant l'indignation, me jouant l'offusqué, le saligaud! Incroyable.
Bon, il me plait, je séduis en douceur quoi. Je ne m'affole pas, c'en est même touchant et terrible. C'est quasiment du militantisme quelque part.
Bref, il accepte, il s'accepte enfin, et assume enfin ce qu'il est venu chercher. A la bonne heure.
Et là, j'y vais quoi. Je suis sur la brèche.
Elle: rires (quasi aux éclats)
Lui: - Et là, il me dit: "bueno, de acuerdo, pero la puntita no mas!" ("bon, d'accord, mais le ptit bout, pas plus").
Elle: Rires
Lui (avec, tout à coup, cet air du chercheur qui a trouvé et validé quelque chose de précieux et d'éminemment sérieux): - voilà, ma pauvre, que veux-tu... La puntita no mas. C'est toujours pareil: plus une société réprime ces préférences là, plus ça sort en malsain, en hypocrite, en rabougri, en mesquin. Le drame, c'est ce Paraguay pédé comme moi qui ne le sait pas, qui ne veut pas le savoir...Quelle hypocrisie!
La puntita no mas...On en est restés là, évidemment. J'ai le sens du devoir, mais faut pas charrier...

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