samedi 8 mars 2008

Classe magistrale de géopolitique latinoaméricaine pour le merdaillon du voisinnage

Chateau Rouge, Paris, en 2008.








L'enfant, 9 ans et demi, pose sa baballe. Ca fait un long moment qu'il me regarde en coin, avec stupéfaction; les réactions tout feu tout flamme, les moulinets qui s'agitent dans l'air, le visage rouge-violacé. Intrigué plus qu'apeuré, le bout de chou.
Un regard pour ses parents, tout aussi perturbés.
Il se lance.
Miguelito s'approche de moi et demande:

- Pourquoi que ce qu'y disent dans l'ordinateur, avec tous les monsieurs à moustache de là bas, pourquoi ça te rend tout fou et puis tout content, et puis tout fou encore?

Correa vient de plier, de fusiller le Chiot Impérial Uribe du regard et par là même vient de se culminer le plus fondateur des sommets latino-américains de ces dernières années.

Je pris alors l'enfant par les tempes, le soulevai du sol, devant ses parents médusés mais totalement paralysés. Et je lui tins à peu près ce langage, dans cette position pédagogiquement approprié, en hurlant vaillamment, comme de bien entendu:

" Enfin, enfin, la communauté internationale se penche sur le conflit armé interne de Colombie, et ne laissera plus Uribe le réduire à un problème de terrorisme.
Enfin, enfin les pays de la région décident SEULS de résoudre leurs différends et rappellent à tous ses membres la nécessité du multilatéralisme.

Tu comprends ptit Miguelito? Hein, tu comprendes Mendez?

La Colombie, mon coco, ce n'est pas en éliminant les FARC, évidente impossibilité militaire, quoiqu'en dise la propagande uribiste, qu'on va régler quoi que ce soit.

Ecoutes moi bien ptit con.

La Colombie, mon coco, souffre d'un conflit armé interne, de moyenne intensité,
dont les victimes principales sont la population civile rurale,
entre l'Etat colombien (appuyé par 12 milliards de dollars du Plan Colombie USA, en nombre le 5ème personnel militaire au monde, troupes et civils, selon le statistic book du droitier The Economist, je te le rappelle),
des groupes armés irréguliers (au sens ou ils ne respectent pas le droit international humanitaire ni le droit de la guerre),
notamment les FARC-16 000 hommes, l'ELN-5000 et des paramilitaires de 5 à 8000,
conflit armé aux soubassements politico-idéologiques encore (révolution marxiste-léniniste-bolivarienne, réforme agraire sans cesse repoussée, groupes d'extermination d'extrême droite etc),
aux comportements mafieux et aux méthodes bien souvent terroristes,
dont le narcotrafic est le principal combustible (et d'autres graves délits internationaux, dont le kidnapping, les trafics de faux billets, d'essence, la traite de personnes, le blanchiment).

Le problème du conflit colombien ne se résoudra que par une pression des pays de la région qui sont les premières VICTIMES de ce conflit, et par les pressions de l'UE.
Et des USA démocrates d'Obama ou de Clinton.

Je repose le merdaillon, et le reprend derechef par la salopette pour le balancer sans égards sur le canapé.


Semaine historique à bien des égards. On retiendra certes aussi, Miguelito, la grande foire de l'information et de la désinformation, les réactions hormonales de chefs d'Etat réduits aux gesticulations de parieurs de combats de coqs en transe...Les mensonges éhontés, systématiques et la mauvaise foi professionnelle d'Uribe, les provocations calculées de Chavez, l'agitation digne de Correa.

On retiendra le moment choisi pour attaquer militairement toute perspective de paix négociée, l'attentat délibéré à la libération de 12 otages supplémentaires, l'image de ce criminel contre l'humanité dans un sac à ordures, lui qui a reçu un coup de grâce, de dos, le bombardement pendant le sommeil, la nuit (crimes de guerre contre crimes de guerre...c'est si beau ce qui se passe chaque jour en Colombie Miguelito, hop, une baffe dans la gueule pour l'empêcher de fuir ce cours magistral),
on retiendra les imbéciles étudiants gauchistes mexicains de l'UNAM injustement massacrés et la survivante (tiens, petit monde, je connais un ancien élève de son père),
on retiendra la fameuse, indécente minute de silence pour Raul Reyes imposée par Chavez sur son Alo Presidente, l'envoyé spécial de la France, lui qui marche depuis 2002 dans des forêts pas possibles pour se faire toiser par Reyes, le seul interlocuteur important pour débloquer les choses, qui était ce jour là en chemin vers ce campement...('eut chaud la bite cui ci). Les intox fumeuses et calculées sur la libération imminente d'Ingrid, sur l'uranium et tous ses sous-entendus.

Mais derrière le show étalé dans les gazettes, tout était extrêmement sérieux.
Cette semaine laissera son empreinte, durablement. Tu comprends couillon de la lune?

TOUS les pays d'amérique latine, même le Pérou de Garcia, ont fait bloc contre le dangereux précédent de cette première attaque préventive dans la région.
Toutes les chancelleries étaient bien conscientes de quel type de doctrine militaire et quel type d'hyperpuissance manœuvre ce genre d'opérations.
Et les manip psychologiques globales qui ont suivi.

Les conséquences d'une absence de réaction auraient été incalculables.
Uribe a du céder. Pour le moment.

Là, sveltement, je fonce sur la maman, la voisine, et la regarde droit dans ses yeux mandes, me tenant tout contre ses seins ou est-ce l'inverse (paskaprès c'est le jour de la femme et j'aurai pu droit).

Car vois-tu Jeanine, ce regard puissant, viril de Correa, lors de leur poignée de mains habilement forcée par le Président Dominicain avec Uribe, c'est le symbole du début d'un rééquilibrage dans le jardin des USA. C'est énorme.

Alors que beaucoup craignaient ses diatribes enflammées, c'est bien le président du Venezuela qui a mis le sommet sur les rails de la réconciliation.

"Nous avons encore le temps d'arrêter un tourbillon que nous pourrions tous regretter", a lancé M. Chavez, qui a su, pour une fois, fermé sa gueule et être conciliant.

Haletant, suant, ébahi et assoiffé par l'insolent brio de cet exposé couillu mis correct en temps réel, je recule et sautille vers le frigo, me prenant une Corona d'importation bien méritée.

Le merdaillon va chialer sur les genoux de sa mère.

Et je me dis: S'ra jamais paraco ni FARCista cui là.
A son âge, Martin Sombra, le Commandant des Farc arrêté il y a 15 jours, commettait son premier meurtre en piégeant sa victime, elle même un tueur à gage qui faisait frire les oreilles de ses victimes. C'était il y a 40 ans.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Ouplay, Patxi tu fesses fort ce soir.
Mais, je ne peux être en désaccord sur le fond. La forme oui, dis tu terrorises les gamins maintenant:-)
Je pensais justement à toi car j'ai visionné un film se passant en Nouvelle Ecosse et chais pas pourquoi me suis souvenue d'un de tes commentaires.
Bon, je te dis Hasta Luego, je me prépare pour une autre à la Havane et Villa Clara.
Mwah,
Loula